J’ai la joie de vous annoncer que je rejoins l’équipe d’enseignant·e·s de l’École supérieure nationale d’arts de Paris-Cergy ce printemps, prenant la suite de François Bon au poste d’enseignante en création littéraire – j’en suis plus qu’honorée. Le projet de l’ENSAPC, qui a pour directrice Corinne Diserens, entre en résonnance profonde avec ma conception de la transmission et d’un geste artistique transversal.
Je quitte donc l’École d’art du Havre où j’ai œuvré, en équipe, depuis 2012, à bâtir un magnifique Master de Création littéraire, et je suis très reconnaissante à la direction de cette formation, Thierry Heynen, mais aussi Laurence Mathey côté université, avec Élisabeth Robert-Barzman, directrice de l’UFR LSH, de m’avoir fait confiance en me donnant la responsabilité du parcours « Création littéraire », ainsi qu’aux autres membres de la direction de l’ESADHaR, Samuel Rinfert et Manon Rivière, sans oublier la présidence de l’école et celle de l’université. C’est Élise Parré qui avait proposé de me confier un enseignement au long cours en 2012 après une invitation en workshop de Béatrice Cussol ; merci à elles – toutes deux artistes et professeures.
Ces six dernières années ont ainsi été plus que denses, passionnantes, formatrices, riches en rencontres, échanges, découvertes, partenariats. Nous avons beaucoup travaillé, écrit, lu et relu, relu encore, relu toujours, discuté, débattu, ri, lu à voix haute, devant des micros, en poussant la voix, « performé », choisi des typos, maquetté, corrigé, visionné, monté, cherché, fouillé, questionné, douté, repris, retravaillé, relu, partagé… Mes collègues et moi pouvons être fier·e·s du travail colossal accompli, de nos étudiant·e·s et diplômé·e·s à l’implication sans faille dont témoignent de nombreuses publications, des participations à des festivals littéraires, des projets éditoriaux. Je penserai toujours au Havre avec une délicieuse saudade iodée, pleine de rire et d’enthousiasmes, une intense fierté, et souhaite le meilleur à ce Master.
Je n’aurais pas l’espace, ici, de rendre à chacun·e l’hommage qu’il, elle mériterait, mais je voudrais tout de même saluer particulièrement Laurence Mathey, ma collègue de l’université responsable du parcours « Lettres » du Master, professeure adorée des étudiant·e·s et âme généreuse qui au fil de ces années est devenue une proche amie – nous avons partagé, outre quelques dizaines de milliers de pages, des litres de thé et des kilos de gingembre confit, quelques fous rires de surmenage. Idem pour Jean-Noël Lafargue, mon « collègue du mardi » avec lequel j’ai patiemment écumé les restaurants du Havre – spéciale dédicace au Al Dente è al nero di seppia… –, ceux de la plage – #bulotspowa –, commenté pas mal de cépages et beaucoup chanté dans le train retour Le Havre/Paris (je m’excuse à nouveau auprès des autres usagers). Nicole Caligaris, autrice qui a rejoint l’équipe de création littéraire en 2017 et avec qui travailler est un bonheur de tous les instants tant nous partageons choix esthétiques et orientations pédagogiques. Vanina Pinter, ma « collègue du lundi » du secteur Design graphique et nos débats littéraires de fins de journée entre deux longueurs en maillot Arena aux Bains des Docks de Jean Nouvel – car quand on aime le design, il faut le vivre dans ses plus belles réalisations le plus souvent possible… (et parce qu’on porte bien le bonnet de piscine, il faut le préciser). Alain Rodriguez qui a souvent subi – avec amabilité malgré ses paupières ensommeillées – ma redoutable capacité à me lancer dans des discussions animées dès le train de 6h40 ; on va être obligés de trouver un cours de Pilates entre le 12e et le 20e. Yann Owens, toujours le sourire éclatant, le goût sûr et les mains dans l’encre. L’exigence bienveillante de Danièle Gutmann et l’implication sans faille de Laurence Drocourt – avec qui échanger en salle des profs a toujours été un plaisir. Et je n’oublie pas que c’est à l’ESADHaR que j’ai rencontré Stéphanie Solinas, artiste photographe qui est devenue une complice de création, amie et que j’ai eu le bonheur de croiser Jean-Michel Géridan et Fabrice Bourlez dont j’estime également le travail, tout comme Claire Cornillon, passée par l’université du Havre. L’efficacité souriante d’Audrey Marel va beaucoup me manquer, ainsi que nos échanges et son sens de l’accueil. Idem pour Corinne Robillard, Morgane Riou, Bruno Dubos, François Desnoyers, Claudine Boutleux, Emmanuel Lalande, Muriel Hardy, Emmanuelle Burvelle : ❤ ad. lib. pour votre professionnalisme, votre attention, votre amitié. Je salue la formidable équipe pédagogique du Master & en particulier, avec affection et complicité, la cohorte d’enseignant·e·s praticien·ne·s de l’écriture qui suivent les projets littéraires, outre Nicole Caligaris, Béatrice Cussol, Jean-Noël Lafargue (et moi) : Sylvain Prudhomme, Frédéric Forte, Clémentine Beauvais, Christophe Manon, Sonia Anton, Minh Tran Huy.
Merci de tout cœur à tou·t·e·s les écrivain·e·s, les artistes que j’ai invité·e·s à intervenir auprès de nos étudiant·e·s et eu le bonheur d’accueillir en nos murs pour des échanges toujours précieux et des soirées toujours pleines de rires et de discussions passionnantes entre l’architecture de Perret et les galets de la plage. (Dream list sur le site Crealit) Ci simu campati* !
Merci aux membres du jury du diplôme venu·e·s, d’année en année, évaluer nos étudiant·e·s et incarner, avec exigence et bienveillance, l’entrée dans leur vie d’artistes, d’écrivain·e·s après l’école et l’université…
Ma vive reconnaissances aux partenaires de la formation avec lesquels ont été créés, au fil des années, des projets qui ont été très positifs pour nos étudiant·e·s, de la participation à des festivals ou des salons du livre, à la production de textes, l’émission de radio, l’animation d’ateliers ou au workshop sur site idyllique : la librairie La Galerne, le centre Pompidou et le festival Extra !, le salon MAD (CNEAI), le Centre Wallonie-Bruxelles, Le Volcan, Le Phare, L’Observatoire de l’espace du CNES, PiedNu, Le Goût des Autres, Lire au Havre, Normandie Livre & Lectures, Terres de Paroles, Positive Economy Forum, le Moulin d’Andé, le MuMa, l’Opéra de Rouen, la Villa La Brugère, le CIPM, La Marelle, Switch (on paper), la revue N/Z et le Bureau des activités littéraires, la librairie Au fil des Pages, Les Yeux d’Elsa, la bibliothèque universitaire du Havre, la Maison de l’Étudiant, l’IMEC, la SGDL, Livre Paris, la Maison de la Poésie de Normandie, le Prix du roman d’écologie, l’ESAM de Caen… Avec une mention spéciale aux Zazous. Mes remerciements particuliers à mes interlocuteurs et interlocutrices de ces institutions, j’ai beaucoup apprécié nos échanges.
Et surtout, merci à vous, étudiant·e·s, cari zitelli, pour votre confiance et votre engagement. Merci d’être vous. Continuez à être aussi intenses, vifs et vives, pertinent·e·s, passionné·e·s. Travailler à vos côtés, chacun, chacune d’entre vous, a été un bonheur et une inspiration. J’ai beaucoup appris, sur l’écriture, les processus de création, le travail de groupe. Et vous m’avez rendue, vous me rendez – car c’est un processus en cours, qui va se poursuivre –, comment le formuler ? Encore plus empathique, vivante. Nous avons ainsi avancé de concert sur les chemins fascinants et escarpés de la création, nous en avons parcouru les lisières et les crêtes, nous avons partagé nos doutes et nos victoires, nos fragilités et nos découvertes. C’est ensemble que nous avons progressé, que nous progressons. Parmi la centaine d’étudiant·e·s havrais·e·s qui ont suivi mon séminaire ou mon atelier que je salue amicalement, une mention spéciale, fière et émue, à celles et ceux dont j’ai suivi le projet littéraire : Jérémy Buldo, Clémence Delbart, Lucie Desaubliaux, Olivier El Khoury, Elsa Escaffre, Joseph Fabro, Basile Galais, Jeanne-Marie Huet, Romain Joquel, Alexandra Laffitte, Frédérique Monnier, Corto Parrinello, Wanda Pendrié, Hermine Raynaud, Camille Reynaud, Alexandru Sacuiu, Valentin Savoye, Gabrielle Schaff, Lucas Sibiril, Guillaume Sorensen, Thi Thu, Léa Vassal. Ainsi qu’à Jonas Alleaume, Gabrielle Arnault, Pierre Autexier, Ariana Daniele, Thomas Dufait, Nina Fabrer, Léo Hebert, Aylin Manço, Jeoffrey Michel, Adeline Miermont, Alexia Morinaux, Isabelle Rodriguez, Eugénie Zély – dont je n’ai pas suivi le projet littéraire mais avec qui j’ai beaucoup échangé – et cela continue.
J’avais axé ma performance pour Flamme éternelle de Thomas Hirschhorn au Palais de Tokyo en 2014 – intitulée « Sur la grève » – sur l’importance de la répercussion de la transmission dans la création. À l’époque, j’enseignais depuis plus d’un an au Havre et je venais de prendre la direction du parcours « Création littéraire » ; plus exactement, dans cette conférence performée, j’évoquais une triangulation création/édition/transmission : « Voici donc ma “flamme éternelle“, en trois mouvements. Vous le savez bien, la combustion ne peut avoir lieu que si l’on réunit trois facteurs : deux composés chimiques (un combustible et un comburant) et une source d’énergie (l’énergie d’activation). C’est ce qu’on appelle le “triangle du feu”. »
Et six ans plus tard, je ne puis que confirmer la vivacité de cette flamme.
Ce processus pédagogique et créatif qui est l’essence même de ma vie continue ainsi dès le mois d’avril à l’école d’art de Cergy. Je quitte donc un bonheur pour un autre. Je vous en donnerai bientôt ici des nouvelles…
* L’expression corse « Ci simu campati » pourrait se traduire par le latin « gaudebamus » ; l’espagnol « hemos disfrutado » ; l’anglais « we enjoyed! » Bref, on a kiffé. Grave. (Et on va continuer…)]